Dans les États en proie à une crise sécuritaire prolongée, la question de la souveraineté est souvent abordée sous l’angle militaire, diplomatique ou géopolitique. Pourtant, un indicateur plus profond, plus intime, révèle la réalité d’un État qui se reconstruit surtout avec sa capacité à protéger les orphelins de guerre, ces enfants qui portent dans leur chair les lignes de fracture du pays. Au Burkina Faso, la récente audience présidentielle accordée aux pupilles de la Nation s’inscrit précisément dans cette dynamique de refondation, où la souveraineté se mesure autant dans la prise en charge des plus vulnérables que dans la défense du territoire.
Ce choix politique marque une rupture nette avec la culture de l’invisibilité qui, dans la plupart des conflits africains, a longtemps entouré les orphelins. Trop souvent laissés en marge, dépendants de mécanismes informels ou abandonnés aux aléas des solidarités dispersées, ils incarnaient un angle mort tragique de l’action publique. Cette présence des pupilles de la Nation dans l’agenda présidentiel du Capitaine Ibrahim Traoré transforme le devoir moral en priorité nationale.
La promesse de créer des écoles dédiées aux pupilles, d’établir des partenariats avec des structures de santé, ou de faciliter l’accès aux services sociaux affirme la vision du président du Faso d’un pays qui se pense dans la durée, et qui investit dans ceux qui incarneront demain la mémoire vivante du sacrifice.
Les pupilles deviennent ainsi un indicateur de souveraineté réelle, celle qui ne se proclame pas, mais se prouve. Ils révèlent si l’État à, la force institutionnelle de prendre soin des citoyens du pays, l’autorité morale de réparer et la vision nécessaire pour transformer une épreuve collective en levier de cohésion nationale. En les plaçant au cœur de l’action publique, le Burkina Faso affirme que la nation ne se mesure pas uniquement à sa puissance militaire, mais à la dignité qu’elle garantit à ses enfants, surtout ceux dont les parents ont donné leur vie pour la terre mère.
Dans ce geste politique résolument assumé, c’est une nouvelle architecture républicaine qui se dessine : une souveraineté enracinée dans l’humain, construite à partir des plus fragiles et projetée vers l’avenir.
Nia Bah
