Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont tranché : leur rupture avec la Cour pénale internationale (CPI) est désormais actée, immédiate, irrévocable. En se retirant du Statut de Rome, les trois piliers de l’Alliance des États du Sahel (AES) posent un acte politique fort, un acte de souveraineté assumée face à une institution perçue comme le bras judiciaire d’un ordre mondial biaisé. Cette décision, mûrie et annoncée avec fermeté, dépasse le simple cadre juridique. Elle s’inscrit dans une dynamique plus large de libération, de réappropriation des leviers de commandement et de refondation de l’autorité étatique.
Ce retrait est un puissant symbole de souveraineté retrouvée. Il illustre la volonté farouche des peuples du Sahel de bâtir un ordre nouveau, affranchi des diktats extérieurs et fondé sur des mécanismes endogènes, légitimes, et porteurs de sens pour les sociétés sahéliennes. Il ne s’agit pas de nier les exigences de justice, bien au contraire ; il s’agit de la redéfinir à partir de nos réalités, de nos valeurs, de nos besoins. Car la justice importée, qui se tait face aux crimes de l’impérialisme et s’acharne sur les résistances africaines, ne saurait être ni crédible ni acceptable.
Cette décision marque une étape essentielle dans la dynamique de refondation politique, institutionnelle et identitaire en cours dans l’espace AES. En rompant avec la CPI, les États sahéliens s’arment d’un outil politique fort pour reconstruire leur architecture judiciaire sur des bases souveraines, capables de restaurer la confiance des populations, de combattre l’impunité sans complaisance, et de garantir les droits humains selon une lecture décoloniale et panafricaine.
Le retrait de la CPI s’inscrit aussi dans la vision géopolitique plus large d’un Sahel uni, solidaire, et stratégiquement autonome. Dans un contexte de menaces sécuritaires multiformes et de pression internationale, cette décision renforce la cohésion de l’AES autour d’un projet de société fondé sur la dignité, la justice et la responsabilité partagée. Elle envoie un message fort : le Sahel ne sera plus une zone d’influence, mais un espace de construction politique.
Aïcha T. Kaboré