L’arrivée de l’ancien Président sud-africain Jacob Zuma à Ouagadougou, dans le cadre du séjour des Afrodescendants, s’inscrit dans un moment clé de la refondation du Burkina Faso. Au-delà de l’accueil officiel et des échanges protocolaires, l’enjeu est profond. Il s’agit d’un moment fort où l’Afrique se regarde elle-même, se parle, se reconnaît et se projette. À Ouagadougou, ce n’est pas un homme politique étranger qui arrive, mais un porteur de mémoire, un témoin des grandes luttes de libération du continent, venu renouer le fil d’une histoire africaine trop longtemps fracturée.
Le retour aux sources, ici, n’est ni nostalgie ni folklore. C’est un choix stratégique pour reconstruire le présent sur les fondements des luttes africaines, sur l’intelligence collective des peuples, plutôt que sur les modèles importés. C’est déclarer que la modernité africaine n’a pas à être imitée, mais pensée, façonnée et assumée depuis l’Afrique elle-même.
Dans ce contexte, la présence de Jacob Zuma n’a rien d’anecdotique, elle relève d’un alignement politique et idéologique entre des dirigeants et des peuples qui reconnaissent l’importance de se réapproprier leur histoire pour construire l’avenir.
Jacob Zuma n’a pas été accueilli comme un simple invité étranger, mais comme un camarade de lutte, un héritier des combats de libération africains, venu saluer le choix souverain du Burkina Faso de tracer sa voie hors des pressions externes. « Je suis venu accompagner mes camarades autorités burkinabè », a-t-il déclaré. Cette phrase est lourde de sens. Elle consacre la fraternité politique entre les résistances africaines et les dynamiques contemporaines de reconquête souveraine.
Ce séjour ne se réduit donc pas à un programme culturel ou symbolique. Il s’inscrit dans la réhabilitation de la mémoire africaine comme instrument de puissance. En soutenant l’initiative de retour aux sources portée par les Afrodescendants et la diaspora, le Burkina Faso affirme que la libération ne se gagne pas seulement sur le terrain militaire ou économique, mais aussi dans les consciences.
Le pays se pose désormais comme un carrefour de renaissance identitaire, un espace où s’élaborent de nouveaux récits de dignité, d’appartenance et de pouvoir. La conférence annoncée sur l’histoire des mouvements de libération n’est pas un hommage nostalgique, c’est une transmission stratégique, destinée à nourrir l’action.
Car le message est clair, se reconnecter à l’histoire africaine, c’est se libérer. Et cette libération est, aujourd’hui plus que jamais, collective et transfrontalière.
D.Kaboré
